Preview UFC 232 – Un dernier show apte à se hisser au dessus des polémiques ?
Si l’ultime show UFC de l’année a été perturbé en amont par des éléments extrasportifs, il n’en reste pas moins prometteur puisque la carte présente deux championnats mondiaux, des stars en besoin de se relancer, des récents transfuges en plein buzz et même d’anciens champions s’accrochant pour rester dans la big league.
On avait connu les modifications de main event en dernière minute, les cartes réduites à peau de chagrin pour cause d’échecs à la pesée, maladies ou diverses raisons, et même les shows tout bonnement annulés faute d’être assez bankables pour la diffusion en pay-per-view, cette fois on a droit (pour la première fois a priori) à un événement changeant de lieu à une semaine du jour J. Au mépris de tous les spectateurs ayant pris leurs billets pour Las Vegas et en réponse à une commission athlétique du Nevada peu complaisante en matière de dopage, l’UFC 232 migre en Californie. Largement pointé du doigt, Jon Jones saura-t-il faire oublier ce cas sans précédent ?
Championnat poids mi-lourds : Jon Jones (22-1 + 1nc) vs Alexander Gustafsson (18-4)
Sous quel angle prendre cet affrontement : celui d’une belle revanche cinq ans après une opposition exceptionnelle ? Celui d’un championnat prématuré entre deux fighters éloignés de la compétition depuis plus d’un an ? Celui d’un duel gâché d’avance par l’énième affaire de dopage touchant Jon Jones ? En effet celui-ci a de nouveau été contrôlé positif par l’USADA, à la même substance (le turinabol) qu’à l’issue de sa deuxième victoire sur Daniel Cormier.
Moins regardante, la Californie accorde le bénéfice du doute à l’ancien roi des mi-lourds. Voilà en tout cas une tâche de plus dans le parcours de JJ, dont on dénombrera bientôt davantage de faits divers en coulisses que de faits d’armes dans l’Octogone. Place néanmoins à un affrontement titanesque en perspective : JJ face à The Mauler, son double stylistique. Depuis leur première rencontre, le Suédois a certes été vaincu par Anthony Johnson et Daniel Cormier, mais il possède LE profil idoine de l’empêcheur de combattre en rond.
À savoir une grande allonge, un striking polyvalent et une mobilité extrême. Passé tout prés d’arracher la décision en septembre 2013, Gus sera un peu plus armé puisqu’il a depuis réalisé d’énormes progrès sur le plan de le lutte et du sol en général. Sa dernière sortie, conclue par KO face à Glover Teixeira, autre superbe striker, lui a logiquement valu un bonus « fight of the night ». Quid de son état de forme un an et demi après ce combat ? La régularité de Jones est aussi sujette à questionnement : seulement trois duels livrés en quatre ans. Un rythme inconvenant pour un homme ayant défendu sept fois sa ceinture entre mars 2011 et avril 2014. Quelque soit l’issue, l’ombre de DC, désormais détenteur de la seule ceinture poids lourds, planera fortement sur la rencontre.
Championnat poids plumes femmes : Cristiane « Cyborg » Justino © (20-1 + 1nc) vs Amanda Nunes (16-4)
Se reposer sur une statistique est bien souvent insuffisant pour rendre compte de l’importance d’un compétiteur, et pourtant on est toujours tenté de le faire concernant Cris Cyborg dont la fiche mentionne un seul revers en MMA…lors de son premier combat pro en mai 2005.
Depuis, c’est invincibilité, distribution de KO à la pelle et gain de tous les titres majeurs sur le circuit féminin en éclosion (championne au StrikeForce, à l’Invicta FC et donc désormais à l’UFC). Le déclin martial de Ronda Rousey a empêché la concrétisation d’un dream match face à Cyborg, mais le plan B est tout aussi attrayant avec sa compatriote brésilienne Amanda Nunes, championne des poids coqs. The Lioness fut d’ailleurs comparée à Cyborg très tôt dans sa carrière, pour rappel ses débuts tonitruants au StrikeForce début 2011 lorsqu’elle atomise Julia Budd en 11 secondes. Malgré une période plus délicate à l’Invicta FC, Nunes arrive en recrue phare de l’UFC à l’été 2013.
Statut justifié depuis avec une fiche de 9-1 dont la punition infligée à Rousey et une double décision victorieuse devant Valentina Shevchenko, descendue conquérir le titre des mouches. On peut s’attendre à un duel en stand up entre ces deux machines de destruction, sinon un éventuel choix tactique pour Nunes quant à éviter le choc frontal pour se réfugier sur le terrain du jiu-jitsu brésilien. Peu démonstrative dans le domaine du grappling depuis une médaille de bronze obtenue à l’ADCC en 2009, Cyborg sera-t-elle préparée à rivaliser dans ce cas de figure ?
Poids welters : Carlos Condit (30-12) vs Michael Chiesa (14-4)
Deux clients bien connus de l’organisation, souvent aux abords des sommets et désormais en perte de vitesse. Particulièrement Condit, sur une série de quatre défaites consécutives, déclin qui prend une véritable épaisseur en élargissant à ses neuf derniers combats, comprenant sept revers. Le disciple de la célèbre Jackson Wink MMA d’Albuquerque, esthète de la discipline dont la polyvalence a longtemps déclenché l’admiration de ses pairs (cf ses stats : 15 victoires par KO, 13 par soumission et 2 par décision), ne s’est jamais remis de ses échecs pour le championnat des welters.
En novembre 2012, alors sur une série de treize succès lors de ses quatorze derniers combats, il croise le fer avec son ancien équipier Georges St-Pierre, passant près de le mettre KO au cours du 3e round pour finalement s’incliner à la décision. Sa deuxième tentative en janvier 2016 déclenche un peu plus de frustration encore tant il a délivré une palette de coups et combinaisons superbes, pour s’incliner par split décision face à un Robbie Lawler à la technique de boxe unidimensionnelle. Lors de ses dernières sorties, Condit n’était plus que l’ombre de lui-même.
Si le but est de relancer sa carrière, Michael Chiesa n’est pas un cadeau. Spécialiste de JJB, débarqué invaincu à l’UFC en 2012 et vainqueur du TUF 15 en soumettant Al Iaquinta, Maverick a dans un premier temps cumulé des bonus de performances. Son parcours s’avère plus problématique depuis 2016 avec un rythme ralenti par les blessures, une série de deux défaites en cours, sans compter les conséquences de l’affaire du bus attaqué par Conor McGregor. Ce duel devrait donc permettre à l’un des deux compétiteurs de revoir la lumière. Quant à l’autre, surtout s’il s’agit de Condit, il devra s’interroger sur une perspective de retraite.
Poids mi-lourds : Ilir Latifi (14-5 + 1nc) vs Corey Anderson (11-4)
Prouver que l’on est davantage que des buzz passagers. Voici pour l’enjeu de ce choc entre deux top 10 précaires. Classé #5 de la catégorie, le Suédois Ilir Latifi reste trop souvent réduit à son acte originel : avoir été le supersubstitut d’Alexander Gustafsson un soir d’UFC à Stockholm face au redoutable Gegard Mousasi (aujourd’hui champion poids moyens du Bellator). Cette initiative courageuse avait été suivie d’un résultat honorable, défaite à la décision.
Depuis, Latifi est entré neuf autres fois dans l’Octogone pour en sortir sept fois avec le bras levé. Il a pu démontré la créativité de son striking autant que ses capacités en submission wrestling acquises durant sa prime jeunesse (médaille d’or européen de l’ADCC en 2003). Ces derniers mois l’ont vu passé un cap, le voyant couper court à la montée en puissance de Tyson Pedro puis porter un étranglement en guillotine à Ovince Saint Preux. Une troisième victoire de rang pourrait le rapprocher d’un title shot, situation ironique si Gus venait à s’emparer du titre le même soir.
Aujourd’hui #10 de la division, Corey Anderson a déçu les espoirs placés en lui au sortir de son triomphe au TUF 19 (succès par TKO en 61 secondes devant Matt Van Buren), systématiquement incapable de franchir un palier lorsqu’un gatekeeper se présente face à lui, subissant par exemple des KO des mains de Gian Villante et Ovince Saint Preux, deux individus vaincus par Latifi ! Anderson a bien quelques atouts dans sa manche, notamment un JJB hérité de Ricardo Almeida et une lutte propre aux universitaires américains. Il s’agira donc d’une passe de trois pour lui aussi, et d’enfin valider son ascension dans le classement.
Poids plumes : Chad Mendes (18-4) vs Alexander Volkanovski (18-1)
Sur le papier un enjeu identique au combat précédent, à savoir un #5 installé de la division (Mendes) défendant son rang face à un #10 émergeant (Volkanovski). Sauf que les deux combattants ont cette fois des trajectoires différentes : Chad « Money » Mendes était promis au titre depuis ses premières apparitions au défunt WEC en 2010, désillusionné à deux reprises par sa bête noire Jose Aldo puis Conor McGregor avant qu’une longue suspension altère sa volonté ; Alexander Volkanovski affiche un tableau sans ombres si ce n’est un vieil échec à ses débuts en Australie, suivi d’une accumulation de titres dans toutes les fédérations importantes de son pays et une continuité sans faille à l’UFC (5-0 depuis novembre 2016).
On remarquera cependant la baisse de la propension de l’Australien à finir ses adversaires depuis son arrivée dans l’Octogone, classique tendance pour les recrues d’horizons lointains. Le moment ne serait-il pas prématuré pour cet honnête striker n’ayant pas vraiment été testé, d’autant que peu convaincant face à Darren Elkins l’été dernier ? Présent sur cette même fight night du 14 juillet, Chad Mendes a délivré une prestation explosive devant Myles Jury, mis KO en moins de trois minutes. Un signal fort envoyé à ses concurrents après plus de deux ans et demi d’absence forcée.
À son meilleur niveau, le double NCAA All-American, 17 combats UFC/WEC à son CV, n’a rien à envier à son rival du soir. Mendes pourrait accessoirement s’emparer seul du record de nombre de KO dans la division des plumes, aujourd’hui partagé avec Conor McGregor. Émergence ou continuité, seules les échanges dans la cage diront leur vérité.
Un mot sur la carte préliminaire : Deux anciens champions et des déceptions
Quelle perte de standing ! Voilà l’ancien champion poids lourds du milieu 2000’s Andrei Arlovski reléguer en préshow, un choix sévère tant le Biélorusse réalise des prestations dignes d’intérêts depuis sa réintégration dans l’Octogone en 2014. Face à lui Walt « The Vault » Harris, fighter du ventre mou dont la carrière n’a jamais décollé (score global de 11-7, 4-6 UFC). Situation moins étonnante pour l’obstiné BJ Penn, autrefois détenteur émérite chez les légers et les welters.
L’Hawaïen refuse de raccrocher malgré une série de six combats sans victoire, persuadé à 40 ans de pouvoir décrocher une ceinture dans une troisième catégorie de poids pour établir un record. Pour le peu expérimenté jiu-jitsuka américain Ryan Hall, ce duel constitue une pierre dans l’édifice de sa notoriété. Mentionnons aussi Cat Zingano, noyée en chemin alors qu’attendue comme une future championne au moment de l’essor féminin du MMA.
En un temps pas si reculé, elle avait finalisé successivement Raquel Pennington, Miesha Tate et Amanda Nunes ! Signalons enfin la présence de l’inconstant mais toujours plaisant Uriah Hall ou l’opposition de syles intéressante chez les welters entre deux hommes sur la pente ascendante, Siyar Bahadurzada et Curtis Millender.
Terminons avec le rappel du programme complet de ce show.
UFC 232– 29 décembre 2018 Inglewood, Californie (The Forum)
Carte principale (RMC Sport 4, à partir de 4h00 FR)
Championnat UFC Light Heavyweight : Jon Jones vs Alexander Gustafsson
Championnat UFC Women’s Featherweight : Cristiane Justino © vs Amanda Nunes
Catégorie Welterweight : Carlos Condit vs Michael Chiesa
Catégorie Light Heavyweight : Ilir Latifi vs Corey Anderson
Catégorie Featherweight : Chad Mendes vs Alexander Volkanovski
Carte préliminaire (UFC Fight Pass, à partir de 2h00 FR)
Catégorie Heavyweight : Andrei Arlovski vs Walt Harris
Catégorie Women’s Featherweight : Cat Zingano vs Megan Anderson
Catégorie Bantamweight : Douglas Silva de Andrade vs Petr Yan
Catégorie Lightweight : BJ Penn vs Ryan Hall
Carte pré-préliminaire (UFC Fight Pass, à partir de 0h30 FR)
Catégorie Bantamweight : Andre Ewell vs Nathaniel Wood
Catégorie Middleweight : Uriah Hall vs Bevon Lewis
Catégorie Welterweight : Curtis Millender vs Siyar Bahadurzada
Catégorie Bantamweight : Brian Kelleher vs Montel Jackson
Qu’en pensez-vous ?